Dans un précédent billet, je montrais l’importance, tout particulièrement à notre époque, de développer une pensée critique.
Cela nécessite de prendre conscience de biais psychologiques ou d’erreurs logiques que nous faisons couramment. Une erreur logique est une faille dans le raisonnement. Les sophismes utilisaient souvent ces failles pour déformer un raisonnement. Rien d’étonnant à ce que les sophismes soient encore amplement utilisés les politiciens, les médias et les réseaux sociaux pour tromper les gens.
La pensée logique n’est pas la seule stratégie d’une pensée critique : il faut aussi considérer la source de l’information, évaluer sa crédibilité et poser des questions pertinentes pour déterminer si quelque chose est vrai. Mais être plus conscient des erreurs logiques communes, par lesquelles notre pensée est souvent manipulée, nous permet de développer une meilleure pensée critique.
Dans les biais psychologiques, découvrons aujourd’hui l’un des sophismes les plus répandus, l’argument ad hominem. Ad hominem signifie littéralement « à propos de l’homme ».
L’argument ad hominem consiste à discréditer un argument en s’attaquant à la personne émettant cet argument plutôt qu’à l’argument en lui-même. On met en doute la fiabilité ou la crédibilité de l’individu qui a fait une déclaration plutôt que de soulever des questions sur la logique de son point de vue ou sur la véracité de son témoignage.
Voici deux exemples d’arguments ad hominem :
- « Après que Juliette ait présenté un argumentaire éloquent et convaincant en faveur d’un système fiscal plus équitable, Sam demande à l’auditoire si nous devrions croire quelque chose venant d’une femme qui n’est pas mariée, qui a déjà été arrêtée pour conduite en état d’ivresse et qui utilise un curieux parfum ».
- « Les stratégies de Green Peace ne sont pas efficaces parce qu’elles émanent toutes d’une bande de hippies sales et paresseux. » On remarquera dans cet exemple que les arguments de Green Peace ne sont même pas cités et encore moins les stratégies sur leurs mérites, mais que l’auteur s’attaque uniquement aux caractères des individus du groupe. Un argument ad hominem est utilisé pour discréditer des arguments. Dans sa forme la plus évidente, comme dans les exemples ci-dessus, on le reconnaît par sa volonté de discréditer sans même accorder d’importance aux propos de l’interlocuteur. C’est un argument qui n’apporte rien à la discussion et n’a rien à voir avec le sujet traité. L’argument ad hominem n’est pas utilisable pour tirer des conclusions logiques. En revanche on peut très bien remettre en question l’autorité de la personne émettant l’argument. Cela ne veut pas dire qu’il faille cependant refuser ses arguments.
Bruno Hourst
Références
Why We Don’t Ask Questions – The problem with critical thinking
Argument ad hominem